ARALES

ARALES
ARALES

Ordre de plantes monocotylédones caractérisées par leurs inflorescences. Certaines, comme les arums (Aracées), affectionnent les lieux humides; d’autres sont rigoureusement aquatiques, comme les lentilles d’eau (Lemnacées).

1. Type étudié: l’arum ou gouet

C’est une plante herbacée (fig. 1) dont les feuilles en fer de lance (hastées) sont attachées sur une tige souterraine profonde ou rhizome. Ces feuilles, enroulées à l’état jeune, sont souvent tachetées de noir et présentent une nervation réticulée. Leur pétiole, très long, est bordé, dans la partie inférieure, d’une membrane ou gaine.

Au printemps apparaissent des inflorescences d’un type particulier: un grand cornet verdâtre, la spathe , dont la base présente un étranglement, enveloppe un axe charnu, le spadice , qui se termine par une massue violacée, et qui porte, à sa partie inférieure, des fleurs minuscules.

Caractères botaniques

L’anatomie présente les caractères des Monocotylédones. Les pétioles sont constitués d’un tissu spongieux (parenchyme lacuneux) contenant des canaux laticifères. Le parenchyme des rhizomes est riche en amidon.

L’inflorescence donne l’illusion d’une fleur dont le périanthe serait la spathe, et le pistil, le spadice. En réalité, celui-ci est un épi de fleurs, recouvert d’une bractée immense. Sur cet épi, dont le sommet est stérile, sont insérés de haut en bas:

– une couronne de fleurs avortées formant des poils;

– un manchon de fleurs mâles fertiles, souvent soudées par quatre;

– un amas de fleurs femelles fertiles, séparées des précédentes par quelques fleurs stériles.

Ces fleurs sont très réduites, unisexuées, sans périanthe (fleurs nues): une seule étamine constitue la fleur mâle, un ovaire, dépourvu de style, représente la fleur femelle (fig. 1). Au fond de l’unique carpelle sont insérés plusieurs ovules (placenta basilaire). Ces ovules sont droits (orthotropes).

La pollinisation est obligatoirement croisée, fleurs mâles et fleurs femelles n’arrivant pas à maturité en même temps. Elle est assurée par les insectes (entomophilie).

Les fruits sont groupés en un épi de baies rouges contenant chacune plusieurs graines albuminées à embryon droit (fig. 1). Ces graines, dispersées par les oiseaux, perdent rapidement leur pouvoir germinatif.

Les plantules se développent comme celles des Monocotylédones à albumen, avec un cotylédon-suçoir (fig. 1).

Biologie. Écologie

Les insectes jouent un rôle important dans la pollinisation. Ils pénètrent au fond de la spathe, attirés par l’odeur d’ammoniaque et la chaleur qui y règnent. Ils y restent prisonniers, car la couronne de fleurs stériles, correspondant à la zone d’étranglement de la spathe, ferme le passage. Ils pollinisent les fleurs femelles par du pollen étranger qui s’est fixé à leur abdomen lors d’une visite à une autre spathe. Après la fécondation, le piège ne fonctionne plus; les étamines arrivées à maturité saupoudrent de pollen les insectes qui iront, à leur tour, polliniser le spadice d’un autre arum.

Après la fructification, les parties aériennes disparaissent, mais le rhizome persiste; la plante est un géophyte, vivace par ses organes souterrains. Ces derniers doivent subir une période de froid pour produire de nouvelles pousses. À la fin du rameau aérien mort, un bourgeon se développe en ajoutant au rhizome un nouveau tronçon (ramification sympodique). De plus, sur les racines, peuvent naître des bourgeons adventifs ou bulbilles. La multiplication végétative est donc très importante: la plante peut être envahissante dans les sous-bois frais sur sol riche en humus neutre (mull) où elle se localise (chênaies-charmaies).

Géographiquement, on les trouve dans les bois humides de l’Europe occidentale et méditerranéenne. Le genre, qui comporte quinze à vingt espèces, présente un génotype variable; le nombre chromosomique 2N est 28 ou 36, et la polyploïdie est fréquente. Chez le gouet, elle présente un caractère géographique, étant plus élevée en Angleterre (2N = 28 憐 2 ou 3) que sur le continent (2N = 28 憐 1 ou 2).

2. Ordre des Arales

On distingue deux familles étroitement apparentées, les Aracées et les Lemnacées.

Les Aracées

Le système végétatif des Aracées offre une grande variété d’expressions avec des modes de croissance qui varient subtilement d’une espèce à l’autre. Les types architecturaux sont riches de formes et de structures. Ce sont des plantes herbacées exceptionnellement ligneuses (buisson sarmenteux), des lianes souvent puissantes (Culcasia , Philodendron ), des épiphytes permanents ou transitoires (après un stade aérien les racines rejoignent le sol), des saxicoles. Ce sont des plantes généralement terrestres, et aussi des espèces de marécages (Cyrtosperma senegalensis, Typhonodendron ) ou même aquatiques et alors flottantes (Pistia ).

Les tiges érigées ou rampantes, mono ou sympodiales contiennent des canaux laticifères articulés (Colocasia ) ou en files (Philodendron ). Ils manquent chez plusieurs genres. De nombreuses espèces produisent des rhizomes souterrains qui peuvent tubériser (Amorphophallus , Remusatia ).

Les racines adventives, parfois contractiles, sont de deux types: les unes sont nourricières et pénètrent dans le sol, les autres, aériennes, servent fréquemment d’appareils d’accrochage. La plupart de ces dernières développent des tissus absorbant l’eau d’une manière similaire au voile des racines d’Orchidées.

Les feuilles souvent très grandes (2 m chez Alocasia robusta , 5 m chez Amorphophallus titanum ) sont alternes avec généralement un pétiole engainant supportant le limbe. Elles sont entières ou composées, perforées chez les Monstera . La nervation constitue un caractère systématique important. Elle est parallèle (Acorus ) ou réticulée (Monstera , Pothos , Arum ).

L’appareil reproducteur est relativement varié (cf. tableau). Les spathes, de couleur verdâtre, terne, peuvent former des cornets d’un blanc pur (Zantedeschia ou «arum» des fleuristes) ou d’un rouge éclatant (Anthurium ).

Le spadice est parfois très réduit, ne comportant que quelques fleurs (Ambrosinia , fig. 2) ou, au contraire, gigantesque (1,50 m de long chez Amorphophallus ), couvert en totalité (Acorus , fig. 3; Philodendron ) ou partiellement (Arum ) de fleurs. Les fleurs sont toujours très petites et sessiles; mais elles sont, soit bisexuées, périanthées ou nues (Calla ), construites sur le type trois (Acorus , fig. 3) ou deux (Gymnostachys ), soit unisexuées et nues, comme chez l’Arum. Les étamines, en général, sont extroses; la placentation est basiliaire, pariétale, parfois axile (Acorus ); les ovules anatropes ou orthotropes; les graines albuminées ou non.

Il faut cependant mettre à part le genre Pistia (Pistiacées de Jussieu). Ce sont des plantes entièrement aquatiques (fig. 4), flottantes, dont la tige, très réduite, est entourée d’une rosette de feuilles. La spathe minuscule contient deux étamines (deux fleurs mâles), soudées en une seule, surmontant un carpelle (une fleur femelle). Cette inflorescence contractée, simulant une fleur, constitue un état préfloral qui évoque les Lemnacées (fig. 5).

Les Aracées comprennent plus de cent dix genres (dont cinq en France) et environ deux mille espèces. Elles sont connues dès le Crétacé. Ce sont des plantes sociales des forêts tropicales d’Amazonie et d’IndoMalaisie; elles sont plus rares en Afrique (Zantedeschia du Cap) ou en Europe. Certaines (Remusatia vivipara ) présentent une dispersion curieuse non expliquée: Java, Himalaya, Afrique, Madagascar.

Dans ces formations forestières, les Aracées jouent un rôle important, particulièrement le long des cours d’eau, par leur taille et leur abondance.

Les formes lianescentes (Philodendron , Culcasia ) ou épiphytes des branches et des troncs d’arbres (Philodendron , Anthurium ) sont plus réduites. Parfois (Monstera ), les graines, disséminées par les oiseaux, germent sur les arbres, puis les racines aériennes rejoignent rapidement le sol, libérant la plante de son support: le stade épiphyte est alors transitoire.

Certaines Aracées sont cultivées à une grande échelle dans les régions tropicales humides. C’est le cas des Colocasia (C. esculenta principalement), d’origine asiatique. Les taros (ou cocoyams) comportent un large éventail de cultivars. Leurs tubercules renferment une grande proportion d’amidon aisément digéré. Les Xanthosoma (X. sagittifolium , S. violaceum ...) ont pour patrie l’Amérique tropicale et les Antilles. Ce sont les yautia, taniers ou choux caraïbes, à l’amidon plus grossier. Tous ces tubercules réclament une cuisson prolongée pour détruire les cristaux d’oxalate de calcium. Ces plantes font l’objet de recherches agronomiques et génétiques.

D’autres tubercules (Alocasia indica , Amorphophallus campanulatus ) sont utilisés sur une moins grande échelle en Indonésie et dans les îles du Pacifique. Les infrutescences de Monstera deliciosa sont consommées.

Les espèces décoratives sont nombreuses. Beaucoup d’entre elles sont estimées pour leurs inflorescences (Zantedeschia ou arum du Cap, Anthurium ) ou leur feuillage (Dracunculus , Aeglonema , Philodendron ) peu exigeant en lumière, qui en fait des plantes d’appartement rustiques. Mais certaines sont dangereuses. Tel est le cas des Dieffenbachia , qui produisent une protéine mortelle pour ceux qui mâcheraient des feuilles ou des tiges. Les Indiens d’Amérique du Sud utilisent le suc des Dieffenbachia dans la fabrication des poisons de flèche. Il servirait aussi comme anticonceptionnel dans certaines régions. Il provoquerait en effet des stérilités passagères.

En Afrique occidentale, en médecine traditionnelle, de nombreuses espèces sont employées comme médicaments (analgésique, purgatif...) souvent avec d’autres plantes médicinales.

La présence de raphides est générale dans la famille (sauf chez Acorus ). Il existe des produits cyanogénétiques chez plusieurs espèces et parfois des alcaloïdes du groupe indolique.

Les Lemnacées

Plantes uniquement aquatiques (hydrophytes), les Lemnacées sont constituées de petites feuilles flottantes (lentille d’eau, fig. 5) ou immergées.

Leur comparaison avec les Aracées montre des caractères distinctifs, parmi lesquels l’appareil végétatif réduit à une feuille possédant ou non (Wolffia ) une racine non vascularisée, l’absence de canaux laticifères, le fruit akénoïde.

Mais de nombreux caractères les rapprochent des Aracées, notamment des Pistia : l’habitat, la spathe minuscule (fig. 5) ou absente (Wolffia ), les fleurs peu nombreuses (une fleur femelle et une ou deux fleurs mâles) constituées d’une étamine ou d’un carpelle, la germination, la placentation basiliaire, la graine, la pollinisation effectuée par des insectes ou des mollusques aquatiques.

Leur reproduction sexuée, rare, est suppléée par une multiplication végétative intense qui permet, par exemple aux Wolffia d’Amazonie, malgré leur taille minuscule (1 mm), de recouvrir d’immenses plans d’eau. Le bourgeonnement au niveau des feuilles détache, d’autre part, des fragments plus denses, pouvant donc hiverner au fond de l’eau.

Position systématique

La position systématique fut toujours définie en fonction des deux caractères essentiels de l’inflorescence: la spathe et le spadice.

Aussi Engler (1919-1964) donne-t-il à l’ordre le nom de Spathiflorae , le rapprochant des Cyclanthales et des Palmales (palmiers) dont Wettstein (1935) accroît l’ordre.

Emberger (1960) rapproche davantage les Arales des Pandanales (spathe, fleurs minuscules, souvent unisexuées, albumen, mode de germination), parenté déjà soulignée par Jussieu (1852) et Endlicher (1836). Il les inclut dans le phylum des Pipérales-Spadiciflores. Les Arales s’y individualisent par leur port herbacé, les feuilles à nervation souvent réticulée, les fleurs réduites, sans périanthe, à étamines peu nombreuses.

Enfin, des auteurs soulignent les affinités des Arales avec les Liliales dont certaines inflorescences en épis (Tupistra ) rappellent celles des Acorus (Hutchinson, 1959) ou bien les rapprochent des Hélobiées (réactions sérologiques, nucelle réduit, particularités de certaines graines ou inflorescences).

Cronquist (1981) et Takhtajan (1966) placent les Arales dans la sous-classe des Arécidées, à côté des Arécales (Palmiers), des Pandanales et des Cyclanthales. Bien que les Palmiers soient d’origine plus ancienne, il paraît difficile de les considérer comme les ancêtres des Arales. Le groupe dont seraient issus les deux ordres serait éteint et peut-être à rechercher (Eyde et al., 1967) parmi des apocarpiques. D’autres auteurs pensent que les Monocotylédones sont diphylétiques et que les Spadiciflores (Arécidées) dériveraient des Pipérales.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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